Revue de la Cabaret (Lange & Söhne)

La Lange & Söhne Cabaret a été présentée en 1997. Elle fait donc partie des premières montres de la Manufacture saxonne car les 4 modèles initiaux (la Lange 1, l'Arkade, la Saxonia et le Tourbillon Pour Le Mérite) ont été dévoilés en 1994. La période qui se situe entre 1994 jusqu'à la sortie du Datograph en 1999 est peut-être celle où le talent de l'équipe Lange s'est le mieux exprimé. Sous la conduite du regretté Gunther Blumlein, il était en effet impossible de concevoir un nouveau modèle, un nouveau boîtier sans un nouveau calibre.

La Cabaret symbolise donc parfaitement cette énergie créatrice et comporte ainsi les élements que Blumlein voulait retrouver dans chaque montre Lange : la référence au passé de A.Lange & Söhne, la référence à son lieu de fabrication, Glashutte, en Saxe, une finition extrêmement aboutie et une fonction apportant un plus à son utilisateur (la Grande Date par exemple pour cette Cabaret ou le Zero-reset pour les Langematic). Lange aurait pu sortir cette montre à partir du calibre de l'Arkade qui est aussi un calibre de forme. Il n'en fut rien et un nouveau calibre fut développé car il était à l'époque impensable de procéder autrement.

De nos jours, la ligne Cabaret est composée de deux modèles, la Cabaret, telle que présentée en 1997 et la Cabaret Phases de Lune présentée en 2004. La photo suivante donne un aperçu de la gamme actuelle. A noter la sortie en 2007 de la Cabaret Soirée.



Paradoxalement, alors que la Cabaret était une des montres préférées de Gunther Blumlein, elle est relativement peu présente au sein des collections des propriétaires de Lange, un peu comme si une Lange ne pouvait se concevoir que ronde. C'est fort dommage car finalement, elle occupe une place vraiment à part au sein de la gamme.

Les principales caractéristiques de la Cabaret "simple" sont :

  • Date de fabrication : à partir de 1997
  • Mouvement : Calibre L931.3 Lange & Söhne à remontage manuel d'une taille de 25,6mm sur 17,6mm. Hauteur de 4,95mm. 30 rubis. 3 chatons en or vissés. Fréquence de 21.600 alternances/heure. Spiral en Nivarox. Raquetterie à col de cygne. Platines et ponts en maillechort laminé.
  • Boîtier : 36,33mm sur 25,5mm. Hauteur de 9,1mm. Existe en or jaune, en or rose et en platine.
  • Glace et fond : verre saphir (d'une dureté de 9).
  • Aiguilles : en or.
  • Cadran : argent massif.
  • Fonctions : heure, minutes, secondes, grande date, poussoir de date rapide intégré au boîtier.

Le calibre L931.3



Examinons maintenant de plus près le modèle or rose & cadran argent.

I) La vue d'ensemble

La première impression qui se dégage de cette montre est une impression d'élégance surannée du fait de son esthètique hors du temps. Sa forme rectangulaire, l'or rose, le boîtier art-déco donnent le sentiment que cette montre a plus sa place en soirée que pendant la journée. Et pourtant, c'est un régal de la porter au quotidien. Contrairement à une 1815 qui est une montre très sobre, la Cabaret fourmille de petits détails qui rendent cette montre très attachante. La Grande Date saute aux yeux car sa taille en impose dans une montre à la taille très classique. Le style particulier du boîtier et les détails du cadran constituent la suite de la phase de découverte. Et nous finissons par le plat de résistance : le remarquable calibre de forme L931.3.

II) Le boîtier et le cadran

Le boîtier est peut-être finalement l'élément le plus caractéristique de cette montre. Avec son style art-déco, il épouse parfaitement le poignet et rend la montre plus grande qu'elle n'est vraiment. La finition est remarquable et le travail et le dessin des anses donnent un aspect original et classique à la fois à la montre. Il est évident que Gunther Blumlein voulait retrouver un certain esprit de la Reverso classique à travers cette montre. Tout le talent a consisté finalement à retrouver effectivement cet esprit mais avec une montre radicalement différente. Les proportions harmonieuses de la Reverso classique sont bien là mais dans une montre peu semblable. En effet, en mettant côté à côté une Reverso et une Cabaret, les différences sautent aux yeux et on ne peut se tromper sur leurs pays d'origine respectifs !

En ce qui concerne le cadran, les index et chiffres appliqués et le contour de la Grande Date donnent un relief très agréable. C'est d'ailleurs un plaisir de tourner le poignet pour observer ces petits détails. A noter que les chiffres romains tournent tous dans le même sens ce qui ne peut que réjouir les puristes. Enfin, la Grande Date, une des caractéristiques de Lange, se dévoile. Il est connu qu'elle divise les amateurs d'horlogerie, nombreux étant ceux qui regrettent l'absence de zéro sur la croix des dizaines. En ce qui me concerne, j'adore cette Grande Date pour plusieurs raisons : elle est imparfaite (la profondeur n'est pas la même entre les dizaines et les unités du fait du système de croix) et cette imperfection lui donne un charme fou, accentuant le côté mécanique de la montre. De plus, l'absence de zéro transforme totalement la montre. Esthètiquement, elle n'est pas la même entre le 1er et le 9 du mois puis les jours suivants. Une fois cette Grande Date adoptée, on ne souhaite pas que le zéro soit dessiné...




La comparaison avec une Reverso montre bien la différence entre les 2 montres.
A noter la construction opposée des mouvements, verticale pour la Reverso, horizontale pour la Cabaret.

III) Le calibre

Lorsqu'on retourne la montre, le calibre L931.3 se dévoile. Et c'est un grand spectacle et ce, pour deux principales raisons. La première est que le calibre épouse parfaitement la forme du boîtier. Il est radicalement rectangulaire et n'a pas d'arrondi aux coins comme certains calibres. La deuxième est qu'on y retrouve les caractèristiques des calibres Lange : platine 3/4, col de cygne, coq du balancier gravé, châtons en or etc... et le fait de les retrouver dans un calibre de cette forme donne un côté très original et très différent des autres calibres Lange. Les 4 grosses vis bleuies aux 4 coins du calibres accentuent l'aspect rectangulaire et assoient le calibre. La platine est découpée comme d'habitude dans du maillechort. Comme toujours avec Lange, la finition est exceptionnelle comme le montre la qualité des anglages des pièces.

IV) A l'usage

A l'usage, la montre se révèle très agréable : le boîtier épouse parfaitement le poignet,elle est confortable. Mais le gros point positif est le plaisir incroyable que procure le remontage : il est d'une douceur inégalée. Cela peut d'ailleurs paraître surprenant car on ne sent aucun cran. A la fin du remontage, on sait que la montre est totalement remontée car le système de blocage fonctionne à merveille. Un outil est indispensable sinon pour cette montre : un cure-dents afin de pouvoir utiliser le poussoir de date rapide intégré dans le boîtier. Bref, après près de deux ans d'utilisation, la montre s'est révélée sans faille et d'un grand plaisir à manipuler.

Conclusion

La Cabaret est une montre très attachante. Du fait de son esthètique surannée, les amateurs d'horlogerie s'intéressent assez peu à cette montre. C'est dommage car elle symbolise la meilleure période de Lange. De plus, elle est très peu vue contrairement à une Reverso. Montre sans concession, elle constitue un des must des montres de forme. Le prix est malheureusement en conséquence.



Les plus :
  • Une montre de forme avec un vrai calibre de forme qui occupe une place à part dans la gamme Lange
  • La finition exceptionnelle des éléments
  • Le plaisir au remontage
  • L'esprit de Gunther Blumlein qui se ressent
  • La Grande Date sans zéro quand on l'aime
Les moins :
  • La Grande Date sans zéro quand on ne l'aime pas
  • Le prix, très élevé (15.000 euros)
  • Un bracelet d'origine noir mat plutôt triste
Pour en savoir plus

Le site de Lange & Söhne
Interview de Gunther Blumlein par Peter Chong sur Timezone
(indispensable pour comprendre l'histoire récente de Lange)
Le forum Lange sur The Purists
Le forum Lange sur TimeZone
Le forum Lange sur Horomundi

François-Xavier, le 12 août 2007.